Les quartiers populaires autour desquels gravitent bien des discours politiques, sont souvent présentés par ces mêmes discours comme fondamentalement dépolitisés, vides de toute pensée politique, exempts de tout engagement. Envisagés « de l’extérieur » par les institutions, ils sont perçus comme « en dehors » de celles-ci, dans une altérité stigmatisée et justifiant les réponses autoritaires et purement répressives aux problématiques de leurs habitant·es.
Ulysse Rabaté s’applique à démonter les fondements mêmes de cette exclusion de la sphère publique, analysant la manière dont ces quartiers produisent des pratiques et des savoirs spécifiques inscrits dans un dialogue permanent avec l’ordre institutionnel, que celui-ci soit conflictuel ou conciliatoire. Théâtre de mobilisations importantes (allant des révoltes urbaines aux actions solidaires pendant la crise sanitaire, en passant par les luttes contre le racisme, les violences policières et la constitution de caisses de soutien), ces formes de politisation propres aux quartiers s’avèrent enracinées dans l’expérience quotidienne et incarnent des valeurs, des normes et des attitudes qui récusent parfois l’esthétique politique dominante. Streetologie propose ainsi une réflexion indispensable pour celles et ceux qui souhaiteraient mieux saisir les dynamiques particulières qui structurent ces espaces sociaux et symboliques, et comprendre en quoi elles sont porteuses de renouveau dans les modes d’expression de la citoyenneté.